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Cette recette de conserves est inspirée d'un truc que je fais dans ma cabane en hiver. Oui, il y a longtemps déjà, je me suis construit une petite cabane en rondins sur le flanc d'une montagne, perdue dans la forêt. Là-haut, il n'y a rien, mais aussi, il y a tout. Car parfois, du rien, c'est tout ce que je veux.
Là-haut, il n'y a pas de voisin, pas d'électricité, pas de téléphone, pas d'eau courante, ni de... salle de bains, et encore moins d'internouilles. Là-haut, tout ceux qui n'ont que deux pattes, ont aussi deux ailes, sauf moi. Seul un fou irait habiter là-haut. En effet, ce petit coin de paradis, c'est mon asile.
Il faut grimper longtemps dans une forêt dense pour y arriver. Il n'y a pas vraiment de sentier, sauf celui des souvenirs, et il faut parfois utiliser des cordes rudes pour y monter. Tout au long de l'ascension, les oiseaux alertent tous les autres habitants de la forêt de mon intrusion. Ce faisant, je croise des centaines de pistes de lièvres. Il n'y a pas de piste de motoneige, ni la moindre trace de pneu, et c'est tant mieux.
Une fois parvenu là-haut, il y a une vue imprenable, une forêt sauvage, des étoiles, et de l'air pur.
Au printemps, il y a des mouches noires, et des champignons.
En été, il y a des maringouins, et des champignons.
En automne, il y a des couleurs, et des champignons.
En hiver, il y a le silence, et des lièvres pour mon chaudron.
Le silence nous apprend bien des choses, si on sait l'écouter.
Le silence nous fait voir des choses qu'on pourrait renifler.
Le silence nous fait sentir des choses qu'on ne pourrait voir.
Le silence nous arrache le cœur dès qu'on lui tend l'oreille.
...
Contrairement aux lièvres, ils sont pas cons les champignons. Ils attendent bien sagement, en silence, bien au sec dans leurs bocaux, que les lièvres arrivent. Quand les lièvres sont là, ils en sortent pour m'offrir ce pâté.
Pendant que le lièvre mijote doucement, je mouds la farine dans mon moulin. Il m'a été offert par la cascade, ce moulin. Elle me l'a patiemment fabriqué pendant des milliers de printemps en faisant rouler une pierre dans la cavité d'une autre. Quand j'y suis arrivé, le moulin était prêt. Je me suis prosterné, j'ai dit merci à la cascade et j'ai emporté ce précieux présent dans la cabane.
Il a juste la bonne forme et son granit est parfaitement poli. Je m'en sers aussi pour moudre le café, et les épices. Je peux en faire une petite poignée à la fois. On ne sait vraiment pas comment la farine est précieuse sinon qu'en la faisant avec une pierre dans la main. Les pépites dorées y deviennent lentement un doux trésor caressé du bout des doigts. Tant qu'aux grains de sarrasin, ils y pètent joyeusement, en dégageant cet arôme particulier, qui s'accorde si bien avec le café.
le son que ça fait, est un trésor dans le silence,
l'odeur que ça dégage est une bénédiction dans l'air glacé,
les efforts que ça demande réchauffent la notion du temps,
l'usage de cet objet primitif creuse lentement l'appétit.
...
Quand le grand pâté est enfin assemblé dans un petit chaudron en fonte graissé, je le place sur une pierre plate déposée sur mon poêle à bois, puis je le recouvre d'un cul de poule à l'envers. Ça fait un genre de four, je crois, et le pâté y cuit doucement.
...
C'est une séance de torture où le bourreau commence par le nez.
Comme le temps, il fait sa besogne, sans pitié.
Mon estomac hurle de douleur dans ma tête,
mais en silence.
En plus de 30 ans, j'ai rarement réussi à en manger sans me brûler la gueule. Le pâté de lièvre aux morilles, c'est trop bon. On doit souffrir pour le mériter.
Après *ce* repas, je sors dans la neige, la tête nue sous les étoiles, et je hurle contre les loups, qui ont déchirés le silence pendant la naissance de la nuit.
En loup, je prétends qu'ici, c'est chez moi, et qu'ils sont mieux de pas venir bouffer mes lièvres ou pisser sur mes champignons.
Ils me répondent qu'ils étaient là avant, et que si ils ne m'ont pas déjà dévoré, c'est que je pue.
Je leur répond que si j'en vois rôder un près de ma cabane, je lui file un grand coup de raquette dans les couilles, voilà !
Quand j'ai bien passé mon message, je rentre dans ma petite cabane, en silence.
Eux ils continuent, :
- C'est ça, va te cacher dans ta cabane. Peureux ! Peureux !
- Il a déjà froid le gros humain ? Frileux ! Frileux !
- Non mais pour qui il se prend celui-là, un jour on va t'avoir !
Pff ! Grandes gueules ! Dans le fond, ils me craignent les loups, car j'en ai jamais vu un seul sur la montagne dont je fais partie.
Le ventre rebondi de lièvre, les cheveux pleins de flocons de rêve, j'ajoute des grosses branches dans le petit poêle, laisse sa petite porte entrouverte, me couche sur un lit étroit, fait de cordes tressées entre deux longues branches, puis recouvert de peaux de lièvres. Le lit craque sous le poids de l'effort de m'y reposer.
Enfin blotti en solitaire dans cette chaude douceur animale, je contemple le feu, hypnotisé. Le feu, c'est la télé de l'âge de pierre.
Je ne pense plus à rien, ne rêve plus à rien, n'ai plus envie de rien, et tout ces riens, me comblent. Je ne suis plus rien.
Finalement, je ronfle, pour faire chier les loups qui essaient de dormir.
Le lendemain matin, avant le café, il y aura un autre lièvre dehors pour mon chaudron. Les lièvres sortent surtout la nuit, dès que les loups ont fini de chanter. À tous les matins, y'en a un qui est resté coincé quelque part entre des branches. Je n'ai qu'à le ramasser avant qu'une autre bête ne le fasse. Il va dégeler lentement près du poêle, pendant que je bois mon café, que je mange mon gruau et mes galettes de sarrasin, les yeux reniflant le moindre détail d'une forêt infinie, à travers une petite fenêtre d'une petite cabane perdue sur le flanc d'une montagne.
Cette photo a été prise par Le Père Michel, la fois où je l'ai invité à la cabane. Il ronfle pire que moi Le Père Michel. Le lendemain, tous les loups avaient déguerpis.
Quand je redescends de la montagne, quand je redeviens tout bêtement un humain, en ville, ce pâté me manque parfois. Ma tête me dis que mon ventre en veut encore. Je descends donc parfois des lièvres, et des champignons de la montagne, et je les met dans des bocaux.
Enfin, voici comment.
Cette recette fera 18 pots de 500 ml. Chaque bocal fera un pâté, et chaque pâté nourrira un ours.
Amis Européens, notez bien que nos lièvres d'ici sont pas plus gros que des lapins et que c'est quand même délicieux avec du lapin.
Vous aurez deviné que ça prend peu d'ingrédients pour cette recette :
- 7 petits lièvres du Québec, nettoyés (ou de petits lapins d'environ 1 kg net)
- 2 lbs (900 g) d'oignons jaunes grossièrement haché
- 200 g de morilles séchées
- 400 g de champignons sauvages variés, séchés
- 1 bouteille de vin rouge
Au service :
- des abaisses de pâte brisée
- une grosse pomme de terre
- une grosse carotte
- 1 c. à s. de farine
- 1 c. à s. de graisse (du beurre ira, en bas de la montagne, sur le plancher des vaches)
Mettre les abats et les cervelles des lièvres au frais en les nettoyant. Dans votre cabane, au frais, c'est près de la fenêtre.
Couper les lièvres en morceaux avec votre hache. Placer les morceaux dans un grand chaudron, et égoutter les champignons dessus.
Couvrir la viande à niveau avec de la neige fondue. Porter à ébullition à couvert. Pour le mijoter, placer une pierre plate sur votre poêle et poser le chaudron dessus. Il va cuire comme ça à feux doux jusqu'à ce que le viande se sépare bien des os.
Durant la cuisson, on aura amplement le temps de hacher les oignons et de trancher les champignons, les cervelles et les abats. On pourrait aussi tendre les peaux sur leurs cadres et de commencer à les gratter.
Quand la viande est cuite, passer le bouillon pour le recueillir. Y verser les oignons hachés, puis réduire le tout à environ 2, 5 litres.
Pendant ce temps, désosser la viande. Il faudra brûler les os dès qu'ils seront assez secs. C'est une très mauvaise idée de laisser traîner ça dehors, et si vous les gardez à l'intérieur, les souris vont se régaler.
Sauter les abats dans un peu de graisse et les verser dans le bouillon réduit, ajouter la viande et les champignons tranchés y verser la bouteille de vin et couvrir les solides à niveau avec de la neige fondue au besoin.
Reporter à ébullition et mijoter pour une petite dizaine de minutes.
Empoter en laissant 1 pouce (2,5 cm) d'espace sous le goulot.
Suivre ces instructions pour la mise en conserves d'aliments peu acides à l'autoclave.
Durée de stérilisation de La garniture de pâté de lièvre aux morilles à l'aide d'un autoclave :
• Stérilisez 75 minutes pour les pots de 500 ml
• Non testé avec des pots d'un litre, mais 90 minutes serait suffisant, en théorie
Au service :
Cuire la pomme de terre et la carotte à la vapeur.
Dans une petite casserole fondre la graisse, y dorer la farine, puis y verser le délicieux bouillon du bocal pour l'épaissir, retirer du feu et laisser refroidir environ 5 minutes et incorporer la viande et les champignons en mélangeant délicatement pour bien l'enrober. Couvrir et laisser refroidir pendant que vous préparez votre pâte brisée.
Préparez vos abaisses de pâte brisée. Rouler votre pâte plus épaisse que d'habitude, puis en foncer une beau ramequin graissé.
Préchauffer le four à 400°F (200°C ou thermostat 7) la grille en bas.
Couvrir le fond et les cotés de votre ramequin avec des tranches de pomme de terre d'environ 1 cm d'épaisseur.
Verser la garniture dans l'abaisse en faisant un léger comble, si possible.
Couvrir de rondelles de carottes.
Mouiller les rebords de la pâte, puis y déposer l'abaisse du dessus. Bien presser les rebords puis les replier vers l'intérieur. Presser de nouveau en faisant des motifs décoratifs. Pratiquer une petite cheminée ronde au centre et décorer avec les surplus de pâte.
Enfourner et cuire pour 10 minutes, baisser le four à 350°F (180°C ou thermostat 6) Laisser cuire environ 15 minutes de plus ou jusqu'à ce que la croûte soit bien dorée.
Bon appétit ! Mais faites attention, c'est très chaud...
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